Pour tous les afficionados du triathlon, Stéphane a pris le temps de raconter son aventure. La voici :
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Comme promis, voilà un (long) résumé de la journée du 15 août au cours de laquelle s’est déroulé l’EmbrunMan : 3800m de natation, 188km de vélo en montagne et bien sûr, cerise sur le gâteau, un marathon vallonné pour agrémenter l’après-midi et le début de soirée.
Evidemment, je relate cet événement tel que je l’ai vécu dans ma bulle bien personnelle mais je pense à tous mes collègues du club qui se sont inscrits et qui ont fait tous les efforts pour s’aligner au départ et vivre cette aventure humaine exceptionnelle. Une pensée aussi pour ceux qui s’étaient jetés dans l’aventure mais qui, pour diverses raisons, n’ont pas pu prendre le départ avec nous.
Lundi 12 août fin de journée : arrivée à Embrun avec toute la petite famille, installation à l’hôtel à un kilomètre du parc à vélo.
Mardi 13 août fin de journée : je profite d’un passage en ville pour récupérer mon « kit de compétiteur » comprenant le traditionnel bonnet de natation, les dossards, les autocollants pour le casque et le vélo et, le plus important, un sac dans lequel il faut placer son ravitaillement personnel et qui sera distribué en haut du col de l’Isoard.
La foule des triathlètes se presse déjà dans la salle des fêtes d’Embrun. La plupart arborent des T-shirts « finisher » de divers IronMan autour du monde. Mon absence totale d’expérience sur cette distance me rend fébrile et nerveux devant tant d’assurance de mes confrères trisportifs.
Mercredi 14 août : sous le signe de la détente le matin. Comme le règlement l’impose, le vélo est déposé dans le parc en fin d’après-midi. Je suis bien placé, juste devant la sortie et à l’ombre d’un arbre. Je suspends mon vélo, dégonfle les pneus pour ne pas risquer une explosion avec la chaleur, puis bâche le vélo pour la nuit. Rendez-vous demain à 4H30 pour les tous derniers préparatifs.
Le soir, le stress grimpe en flèche et le buffet de pâtes organisé par l’hôtel est absorbé avec difficulté. Dans quelle galère me suis-je engagé ?
Jeudi 15 août : la courte nuit n’est guère mieux…Je ne trouve finalement le sommeil que vers 2H00 du matin pour être réveillé en sursaut à 3H00 par les multiples alarmes programmées.
Comme le buffet de la veille, le petit déjeuner de l’hôtel (oui, oui, c’est ouvert à 3H00 exceptionnellement) reste devant moi sans que je puisse avaler grand-chose. Je me force néanmoins à manger mais l’ensemble me reste sur l’estomac.
4H00 : réveil de ma dulcinée pour profiter du taxi vers le lieu de départ.
4H30 : je suis devant mon emplacement dans la nuit noire des Hautes-Alpes. Je me félicite d’avoir pris ma frontale pour finaliser les derniers préparatifs.
5H00 : je me force à gober une dernière part de « GatoSport » pour disposer de l’énergie nécessaire aux 3800m de natation puis j’attaque le long processus d’enfilage de la combinaison. Un peu de crème anti-frottement dans le cou puis mon voisin m’aide à positionner la fermeture. Le bonnet et les lunettes sur la tête, je prends la direction du sas de départ non sans avoir précisé à madame, debout derrière les grilles qui emprisonnent les futurs bagnards de l’effort, que je « me dépêche de revenir pour l’apéro ».
5H40 : les femmes sont déjà sur l’aire de départ et à 5H50, 10 minutes avant la meute masculine, elles s’élanceront dans les eaux noires du plan d’eau sous les acclamations d’une immense foule de spectateurs et les crépitements des flashes.
5H50 : 10 minutes à patienter…mon estomac se rebelle et a la ferme intention de refuser la digestion du GatoSport et de mon petit déjeuner.
Pour ne plus y penser, je déroule dans ma tête les étapes de la journée : une première boucle de natation en mode « tranquille », j’essaierai d’accélérer sur le deuxième tour. La partie vélo sera longue, j’ai prévu 8 heures d’après ma reconnaissance de juin. Quant au marathon, c’est la grande inconnue. Je n’ai jamais couru plus de 35 km et surtout, jamais à la suite d’une dizaine d’heures d’efforts. Il ne faudra jamais passer dans le rouge et mon ambition reste de ne pas marcher pendant le marathon.
5H55 : l’aire de départ s’ouvre et je quitte le sas d’attente pour fouler les petits galets de la plage entouré des 1400 autres bipèdes en néoprène.
5 minutes…mon esprit glisse vers les longues heures d’entraînement depuis le 1er janvier…plus de 6000km de vélo, presque 1300km de course à pieds et 200km de natation…
1 minute…je déclenche mon chrono et repositionne ma montre à l’abri sous le néoprène, place le bonnet sur les oreilles, descends les lunettes sur les yeux…il n’y a plus grand-chose à faire alors je ferme les yeux et je construis ma bulle de protection autour de moi.
30 secondes…mon cœur cogne dans mes oreilles, j’ai l’impression d’être complètement seul.
GO !
Je trotte jusqu’à l’eau et me jette dans la nuit avec un dernier coup d’œil à la bouée au fond du lac qui est éclairée par les phares d’un camion de pompiers.
Il y a foule dans le lac, les poissons doivent avoir un réveil difficile !
Je suis un peu chahuté sur les 400 premiers mètres du fait de la densité de nageurs au mètre carré. A nouveau mon estomac se rappelle à mon souvenir…se concentrer uniquement sur la nage et la gestion de course. Je suis mal placé mais ce n’est pas grave, la journée est encore longue et ce n’est que le premier tour.
Le soleil se lève derrière les montagnes quand on arrive à la bouée au fond du lac, l’orientation devient plus aisée et je commence à me détendre. Il reste 800m avant de repartir pour un tour et, enfin, je trouve mon rythme et attaque une lente remontée.
Le deuxième tour débute plus sereinement, nous sommes tous étalés en largeur et longueur et il n’y a presque pas de frictions à l’exception du passage des bouées. La lumière du soleil éclaire le trajet et je repère facilement les bouées suivantes. Je me sens de mieux en mieux…j’échangerais bien un troisième tour contre quelques km de vélo en moins.
H+1h05min : mes doigts effleurent le bord de la plage devant le panneau d’arrivée. Je quitte à regret la position allongée pour me retrouver sur mes pieds en direction de la zone de transition. Et d’un !
Mon vélo m’attend sagement. Comme décidé, je me change intégralement et utiliserai des vêtements de vélo adaptés plutôt qu’une trifonction moins confortable.
De longues minutes sont consacrées à mettre mon cuissard de vélo en étant mouillé mais j’espère que cet investissement me permettra de conserver un peu plus de fraîcheur à l’amorce du marathon. Les manchettes sont enfilées, le coupe-vent fermé car il ne fait pas très chaud à 7H00 du matin. Une bouchée de pain d’épice mais mon estomac ne veut rien savoir et je jette le reste de la tranche.
C’est parti pour 188km de vélo avec, en guise d’échauffement, 13km de montée au-dessus du lac de Serre-Ponçon sur les traces du dernier contre-la-montre du Tour de France.
Cette première ascension se déroule sans encombre, j’aperçois Stéphane (T) et on se souhaite bon courage pour les heures à venir avant de se quitter, chacun sur son rythme. Après Saint Apollinaire, la route redescend vers Savine. La moyenne augmente rapidement sur ce beau macadam tout neuf, couché en position aérodynamique sur le prolongateur.
La vue sur le lac de Serre-Ponçon est superbe avec des petits cumulus qui sont en-dessous de la route et flottent dans la lumière matinale. La concentration se relâche devant le paysage et, alors que je « déboule » à 60km/h en pleine admiration du paysage, un virage serré se matérialise subitement devant le vélo : roue arrière bloquée au freinage et 20 mètres de gomme plus loin j’évite de quelques centimètres la barrière de sécurité après avoir traversée toute la largeur de la chaussée. Ce sera LA frayeur de la journée qui me servira de leçon car je ne relâcherai plus mon attention les heures suivantes. La suite, et fin, de la descente se déroule sans encombre et avec une prudence redoublée.
Le retour vers Embrun pour la fin de cette première partie s’achève par une dizaine de km sur la nationale au milieu des voitures, ce n’est pas le top. Heureusement l’arrivée à Baratier, avec un passage devant l’hôtel où toute la famille est regroupée, gonfle le moral.
Le virage vers Baratier cède la place à 500m d’une montée où il semble que tous les supporters se soient donnés rendez-vous. La route s’ouvre littéralement devant les cyclistes dans un vacarme assourdissant de trompettes, sifflets, hurlements de la foule en délire !
Passé Baratier, les cyclistes baroudeurs prennent la direction du col de l’Isoard avec une partie roulante vers Guillestre puis la remontée des gorges du Guil jusqu’au pied d’Arvieux. Même si je me fais régulièrement dépasser, je m’impose de conserver mon allure, l’arrivée est encore très loin.
Les ravitaillements se succèdent. Un répit de quelques centaines de mètres, avant de tourner à 180° vers Arvieux, me permet de déguster le quatre-quarts que j’ai chipé au petit-déjeuner de l’hôtel. A la première bouchée, ma roue avant tape dans un petit trou de la route et je vois avec désespoir ma tranche exploser en mille miettes dans les rayons. Je rumine ma maladresse alors qu’un compagnon d’effort est hilare devant ma mine déconfite. Du coup on engage la conversation deux/trois minutes sur du matériel de vélo…La discussion ne s’éternise pas car on rentre « dans le dur » et brusquement la demande d’oxygène se fait plus pressante ne laissant plus la place au bavardage.
Un coup d’œil au cardio, tout va bien je suis à 130 bpm qui est le seuil moyen que je me suis fixé avec un transitoire autorisé jusqu’à 150bpm maximum.
Le village de Brunissard s’éloigne laissant la place à une longue montée interminable à plus de 10% et le premier lacet qui permet d’aborder la forêt. Les lacets suivant s’enchaînent, tantôt assis sur la selle, tantôt en danseuse pour délasser les quadriceps. A chaque borne kilométrique, je mâchouille un fruit sec et boit deux gorgées d’eau.
Le rythme d’ascension est bon, je rattrape bon nombre de trisportifs. Le moral s’élève en même temps que l’altitude. La petite descente de la « Casse déserte » offre un instant de récupération et c’est l’amorce des deux derniers km avant le col. Les paramètres moteur sont dans le vert, et j’accélère en surveillant la « pompe » qui prend quelques tours, jusqu’à 148bpm.
Voilà le col de l’Isoard !
L’organisation distribue le ravitaillement « personnel » remis plus tôt le matin. J’ai prévu 5 minutes de pause pour me couvrir avant la descente, refaire le plein de sandwichs et manger un peu. J’aperçois Olivier (B) qui m’a précédé. Quelques mots échangés sur la course et l’état de forme puis je m’isole pour ingurgiter mes tanches de pain de mie/fromage/jambon et remplir les poches du carburant nécessaire aux 90km de vélo qui sont encore à parcourir. Je regarde mon chrono, 5 minutes et 5 secondes, il est temps de mettre ce col mythique derrière !
Refroidi par ma frayeur du matin, la descente vers Briançon se fait avec une prudence extrême. Je me contente d’un 75km/h en pointe sans ambition d’aller taquiner la barre des 80km/h, ce sera pour une autre fois.
Briançon est avalé sans effort et le long retour vers Embrun commence. Il reste deux difficultés majeures : la côte de Pallon (plus de 10% sur 2 km) et la côte de Chalvet (300m de dénivelé juste avant l’arrivée). Après plus de 120km de vélo, les concurrents sont bien étalés et il n’est pas rare de se retrouver seul pendant plusieurs minutes sur les petites routes des Hautes-Alpes.
Le village de l’Argentière est aussi très calme, quasiment pas de spectateurs…mais l’ambiance bascule à nouveau au pied de Pallon où la foule s’est regroupée pour voir les triathlètes brûler des calories dans l’ascension. Je bascule toutes les vitesses « à gauche » et lance le vélo et le bonhomme qui va avec dans la côte.
C’est vrai que cette montée est difficile, même plus que l’Isoard avec la fatigue accumulée depuis l’aube. La surveillance régulière du palpitomètre me confirme que je ne suis pas dans la zone rouge, j’en profite donc pour laisser deux/trois cyclistes derrière, dont un qui fait des zigzags sûrement pour rallonger un peu la distance totale…
Ouf, voilà pour Pallon. Je m’octroie mon dernier sandwich préparé avec soin la veille et, pour la deuxième fois de la journée, « mon manger » m’échappe, rebondi sur le pneu avant, passe au-dessus de ma tête glisse entre mes doigts alors que je crois pourvoir l’attraper et s’étale sur le bitume. Et zut…pas possible d’être aussi maladroit. A contrecœur j’ouvre une barre de céréales bien synthétique…
Le tracé se poursuit avec une descente technique vers l’aérodrome de Mont Dauphin. Un petit coup d’œil à l’aire de manœuvre m’apprend que la piste 16 est en service et le vent d’environ 15kt (on ne se refait pas à travailler dans l’aéronautique). Bon, en résumé, cela veut dire que le vent va être de face, le vrai bonheur.
C’est bien roulant jusqu’à Embrun et, à nouveau, je maintiens une allure modérée pour ne pas taper dans les réserves. Les pistons montent et descendent régulièrement sans douleur et c’est avec sérénité que je lève la tête vers les remparts d’Embrun et la redoutée montée de Chalvet, cruellement placée en fin de parcours.
Effectivement, les muscles chauffent mais le public est là pour soutenir l’effort et les nombreux graffitis dessinés sur le goudron donnent de la lecture pour oublier les brûlures dans les cuisses. Les graviers jonchent la route…pourvu que je ne crève pas à quelques km de l’arrivée…
Encore 1km avant le sommet, 500m…j’aperçois le dernier poste de ravitaillement, encore un effort allez ! Voilà, c’est fait, il n’y a plus qu’à se laisser glisser vers le parc à vélo tout en évitant les nombreux nids de poules placés sur la trajectoire.
200 mètres avant le parc à vélo, je sors mes pieds des chaussures et finis en chaussettes sur les tapis bleus. Petit footing jusqu’au bout du parc où mon emplacement est situé, le vélo retrouve sa position suspendue. Je remercie mentalement le professionnalisme de mon magasin de vélo préféré (Bicimania à Istres, un peu de pub’, il l’a bien mérité) qui a œuvré ces dernières semaines pour me permettre d’avoir un matériel qui fonctionne comme une horloge.
Changement de configuration, la tenue de vélo est arrachée et remplacée par un cuissard de course à pieds, un T-shirt bien confortable, une casquette et une ceinture équipée de deux bidons. En trois minutes je suis prêt à repartir mais m’impose de rester assis encore trois minutes pour manger, boire et stabiliser le muscle cardiaque qui va encore être sollicitée pour le marathon à venir. Je regarde mes pieds fixement pour ne pas voir les autres concurrents qui partent courir.
80 bpm stables, je bondis de la chaise : en avant pour 42km195…mon premier marathon ! Il y a un an et demi ma distance maximale à pied était de 17km mais l’entraînement des mois précédents doit logiquement payer.
A peine sorti du parc à vélo, au bout de 200m, l’unique improvisation faite me joue des tours. En effet, j’ai acheté deux petits bidons à fixer sur la ceinture porte-dossard mais ceux-ci modifient le serrage et battent à l’unisson dans mon dos à chaque foulée.
Ce n’est pas raisonnable de continuer de la sorte donc je m’arrête sur le bord, enlève la ceinture et reprends le serrage en me maudissant. 100m plus loin, je m’arrête à nouveau en fulminant. J’hésite à jeter les bidons dans la prochaine poubelle mais me ravise par peur de la déshydratation entre deux ravitaillements officiels.
Après quelques longues minutes de réglage, la ceinture reste maintenue correctement et la première boucle de 21km se déroule sous mes pieds. Le tour du plan d’eau est une formalité mais à l’approche d’Embrun, la pente s’élève de plusieurs % et les jambes s’alourdissent. Je me suis promis de ne pas marcher donc je trottine en allure « footing rapide » tout en dépassant ceux qui ont fait le choix inverse.
Le tracé se poursuit en traversant le centre-ville d’Embrun où la foule est plus dense, assise dans les nombreux bars ( !). La famille est là pour m’encourager, le moral est à bloc !
Après la montée, la descente puis une longue ligne droite pour rejoindre le Pont-Neuf sur la Durance et repartir en montée vers Baratier. Je prends un top tous les km et estime ma vitesse vers 13 à 14km/h. Un peu plus de 3H30 pour le marathon, même en rêve…
Retour au plan d’eau pour compléter le premier semi-marathon et repartir pour une deuxième boucle. Les premiers symptômes gastriques apparaissent d’un coup : impossible d’avaler quoi que ce soit au ravitaillement qui vient de passer. Pas le choix de toute façon, il faut continuer et gérer la crise plus tard.
Deuxième boucle, avec à nouveau le plan d’eau et la deuxième montée vers Embrun. Le calvaire débute à ce moment : plus d’alimentation égale plus d’énergie pour alimenter le moteur.
Je me rappelle qu’il y a un ravitaillement peu de temps après la côte et décide de passer en « footing mode lent » pour l’ascension tout en refusant de marcher. Je compte 100 foulées et je fais le point pour savoir si je m’arrête un moment…A la 90iem, je décide de recompter jusqu’à 100…et ainsi de suite. Ma vitesse de déplacement a chuté à 8km/h mais je suis enfin en haut devant le ravitaillement. Un bénévole me tend une banane que je tente d’avaler sans succès avec une nausée immédiate qui me fait recracher l’ensemble dans la poubelle voisine. Tant pis, un verre d’eau et je repars sur mon allure de 8km/h dans la descente.
Une fois sur le plat, je rencontre le coach de l’équipe qui remonte le courant sur son vélo et prodigue des encouragements, ça me pousse dans mes retranchements et je maintiens l’allure. Dans un coin de l’esprit, je me souviens d’un conseil…quand plus rien ne passe, le coca peut être la seule solution…il n’y a pas vraiment d’autre choix car je me doute bien que je ne bouclerai pas les 17km restant à l’eau claire.
Lorsque le stand suivant se profile, je me prépare un mélange eau/coca qui passe, à mon grand étonnement, sans aucun encombre. Toujours en mode économique, je me traîne 3km plus loin pour un nouveau mélange qui est absorbé facilement.
Le moral va mieux, le sucre s’assimile vite et la vitesse augmente, 10km/h, puis 11km/h, j’y crois, il reste à peine 10km à faire pour devenir un EmbrunMan.
Le haut de Baratier passe avec un verre d’eau/coca ingurgité et c’est la dernière descente vers le plan d’eau.
38 km…dernier passage sur le pont de la Durance
39km…les enfants sont au bord du tracé à l’amorce du dernier tour de plan d’eau. Je les croise en serrant les poings, il ne reste que du plat, j’y crois si près du but.
Les foulées déroulent de plus en plus vite, 13km/h environ et un nouveau verre plein de potion magique au cola.
40km : je vois François (L) devant, me maintiens à sa hauteur pour qu’on finisse ensemble mais je n’arrive plus à me contenir et accélère vers le dernier km.
41km : j’ignore le ravitaillement pour contourner une dernière fois la piscine et apercevoir le célèbre tapis bleu de l’arrivée.
42km : mon aîné est là, il m’attend pour les 200 derniers mètres ensemble sous les applaudissements des spectateurs. Un bonheur indescriptible me submerge, je lui prends la main en la serrant fort et lève les bras au passage de la ligne.
Ma « bulle de protection » se désagrège en un instant !
Ça y est, c’est fait, 12H44’ minutes d’effort pour un T-shirt de « finisher » qui vaut de l’or. Je n’y croyais pas en janvier mais je me trouve là sous cette ligne d’arrivée sans trop m’en rendre compte, mon fils dans les bras, encore plus fier que son malade de papa.
Dix secondes après me voilà assis par terre avec deux crampes aux adducteurs…la Croix-Rouge se jette sur moi mais ce n’est que le contrecoup et quelques minutes plus tard me revoilà sur mes pattes pour tituber jusqu’au stand de massage.
Une bonne journée s’achève, sans fausse modestie, je rayonne de bonheur. Cependant, je conserve une pensée pour ceux qui sont encore en course et qui n’arriveront que dans quelques heures. Une pensée aussi pour ceux qui n’ont pas pu prendre le départ alors qu’ils en rêvaient et ceux qui n’ont pas pu finir ce parcours inhumain et dont la déception doit être à la hauteur de l’événement.
Je complète mon long résumé avec tous mes sincères remerciements à ceux qui m’ont soutenu ces derniers mois d’entraînement pour maintenir la motivation nécessaire à franchir les moments difficiles.
En surtout première ligne, ma petite famille qui a subi les contorsions nécessaires pour caser les entraînements incessants, les discussions interminables toujours orientées sur le même sujet à la limite de l’obsession, la sonnerie du réveil tous les jours à 5H00 pour l’exercice matinal, le bruit « d’avion » du Home Trainer le soir dans le garage, le stock de fruits secs et de produits énergétiques qui prend toute la place dans les placards, le matériel de vélo étalé dans le garage, la combinaison néoprène au milieu des vêtements de ville, les affaires de piscine constamment en train de sécher dans la salle de bain, les machines à laver toujours pleines d’habits de sport, les menus prohibant la moindre trace de graisse et délibérément axés sur les salades vertes et les pâtes, etc, etc car j’en oublie forcément.
Et maintenant, what else ?
Stéphane
Bizuth du club EmbrunMan
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